La laitue est sensible aux maladies virales et particulièrement au virus des grosses nervures. Le virus MLBVV (Mirafiori lettuce big-vein virus - Ophiovirus) est l’agent causal principal et généralement observé avec le LBVaV (Lettuce big-vein associated virus - Varicosavirus). Il a été démontré que le LBVaV ne cause pas les symptômes du virus des grosses nervures de la laitue, mais contribue au développement de la maladie. Ces virus ont une distribution mondiale et sont responsables d’une des maladies les plus graves de la laitue, de la chicorée frisée et de la scarole. Au Canada, le virus des grosses nervures est fréquent, mais plutôt mineur. Tous les types de laitues sont affectés, mais l’expression des symptômes varie selon la variété. Le virus des grosses nervures est observé en climat tempéré, en champ, occasionnellement en serre et en hydroponie où la maladie peut se propager rapidement à toute la culture. Au champ, les symptômes apparaissent au printemps. Les plants affectés sont disposés en foyer ou de manière éparse. Ce virus est particulièrement dommageable dans les monocultures de laitue où les pertes s’accroissent chaque année. Les plants virosés seraient plus fréquemment attaqués par la bactérie Pseudomonas cichorii.
Le vecteur du virus des grosses nervures est un champignon appartenant au genre Olpidium. La littérature concernant Olpidium est souvent confuse. Un article récent de l’équipe du Dr Marc St-Arnaud de l’Université de Montréal permet de clarifier la nomenclature des Olpidium. Les virus MLBVV et LBVaV, longtemps associés au vecteur O. brassicae, sont dorénavant liés à O. virulentus. Les techniques de biologie moléculaire ont démontré que O. virulentus était responsable de la transmission de plusieurs virus dont le MLBVV, le LBVaV, le TNV (Tobacco necrosis virus), le TSV (Tobacco stunt virus), etc. Olpidium brassicae n’affecterait pas la laitue ni le tabac et ne transmettrait aucun virus. Il causerait par contre une réduction de la croissance des brassicacées qui sont souvent asymptomatiques. Olpidium virulentus est un champignon très polyphage qui n'est pas considéré comme un agent pathogène pour la majorité des plantes sur lesquelles il a été observé. C’est un parasite obligatoire aquatique qui survit dans les racines des plantes et qui apprécie particulièrement les sols froids et humides.
Le champignon survit de nombreuses années (8 à 10 ans) dans le sol sous la forme de spores de repos (chlamydospores). Il survit également sous la forme de sporanges sur les débris végétaux, les hôtes intermédiaires (tomate, concombre, etc.) et les mauvaises herbes comme le laiteron potager (Sonchus oleraceus). Lorsque la température et la saturation en eau du sol sont adéquates, les chlamydospores germent et produisent des sporanges tandis que les sporanges contenus sur les débris végétaux produisent des zoospores. La maturité des sporanges est facilitée à une température de 22 °C tandis que la production de zoospores flagellées et leur déplacement dans la solution du sol nécessitent une température de 16 °C et un sol saturé en eau. Les zoospores sont attirées par les exsudats racinaires des laitues. Le champignon pénètre directement dans les cellules corticales où il infecte les racines et se multiplie lorsqu’il est déjà porteur du virus. Le champignon non infecté le devient lorsqu’il envahit des racines infectées. À des fins de diagnostic, Olpidium est observé directement dans les racines, car c’est un parasite obligatoire et ses spores de survie prennent une forme étoilée caractéristique. Les zoospores infectées sont libérées à l’extérieur des cellules racinaires dans la solution du sol ou la solution nutritive lorsque l’humidité du sol est appropriée et nagent vers d’autres plantes pour assurer les infections secondaires. Le champignon est également disséminé par le sol, les plants contaminés et l’eau d’irrigation. Les spores de survie sont formées dans les vieilles racines qui demeurent dans le sol après la récolte. Les symptômes sont visibles lorsque la température de l’air est inférieure à 16 °C, souvent entre 10 et 16 °C. Une température de l’air supérieure à 15 °C, diminue l’expression des symptômes et à 22 °C, il n’y a plus de symptôme visible. Les plantules peuvent être infectées huit jours après la plantation, mais les symptômes ne seront visibles que 35 jours après la plantation. Le développement du champignon et l’expression des symptômes sont plus reliés à la température de l’air que la température du sol et sont plus évidents tôt au printemps et tard en saison.
Feuille : éclaircissement et gonflement des nervures et des tissus adjacents, donnant l’impression que les nervures s’élargissent d’où le symptôme « grosses nervures ». Les nervures paraissent translucides lorsqu’elles sont regardées en pleine lumière. Les feuilles affectées sont plus épaisses, cloquées et gaufrées. La marge peut être gaufrée et plus découpée. Le calibre des pommes est diminué.
Plant : lorsque les plants sont infectés jeunes, ils sont petits, rabougris et les symptômes sont visibles vers le stade 5 à 6 feuilles. Lorsque les plants sont infectés tard au stade rosette, le port des feuilles externes est dressé, les feuilles sont plus rugueuses, les nervures sont déformées, les plants sont plus petits, la pomme est moins serrée et parfois il y a un jaunissement précoce des tissus. À l’occasion, les plants prennent un aspect « étagé », alternant des feuilles saines et des feuilles affectées, qui sont liées à la succession de température chaude et de température froide.
Le virus des grosses nervures de la laitue peut être confondu avec des dégâts de gel. Deux à trois semaines après un gel léger, sur un étage de feuilles, le limbe apparaît gaufré ou boursouflé à la face supérieure. À la face inférieure, vis-à-vis le boursouflage, l’épiderme est séparé du mésophylle et très tendu.
Les mesures préventives sont les seuls moyens pour contrôler les maladies virales. Une fois que la plante est virosée, il n’existe aucune méthode de lutte curative. Pour contrôler le champignon Olpidium virulentus, il faut se procurer des plants et des transplants sains, porter une attention particulière à la qualité de l’eau et utiliser judicieusement l’irrigation, car Olpidium est un champignon aquatique et cultiver sur des buttes ou dans un sol bien drainé. Éliminer les plants infectés en cours de culture, éliminer et détruire les résidus de culture, surtout les racines, mais ne pas les enfouir dans le sol, car les spores de repos peuvent survivre à une profondeur supérieure à 90 cm (3 pieds). Retarder la plantation au printemps si la température est propice au développement un virus, le sol est humide, le drainage est pauvre ou qu’il y a un historique de la maladie.
Dans les serres, utiliser des sols et des substrats sains et privilégier une hygiène et une salubrité impeccables. Les serres, les systèmes d’irrigation et le matériel doivent être nettoyés et désinfectés entre chaque production. En culture hydroponique, en plus de certaines mesures énoncées précédemment, si une solution nutritive recirculante est utilisée, s’assurer de la qualité de l’eau et éviter la contamination par le sol ou l’air. Des méthodes de désinfections sont connues (filtre, stérilisation par les UV, etc.). L’installation de pédiluves à l’entrée des serres est obligatoire. Les travailleurs doivent se laver fréquemment les mains et désinfecter les outils de travail. Délimiter les zones de plantes infectées et travailler dans ces zones en dernier. Il n’existe aucune variété de laitue résistance à ce virus, mais des variétés ont un certain niveau de tolérance. Au Québec, il n’y a aucun fongicide homologué contre Olpidium.
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