L’anthracnose de la tomate est principalement une maladie des fruits mûrs. Elle est causée par quelques espèces de Colletotrichum, dont la plus fréquente est C. coccodes. Sur les racines, seule cette espèce est connue. Ce champignon est également responsable de l’anthracnose chez l’aubergine et le poivron, en plus d’affecter environ 35 autres espèces cultivées et certaines mauvaises herbes. Chez la pomme de terre, il cause la dartrose. Les lésions causées par C. coccodes sont habituellement caractérisées par la présence de nombreux microsclérotes noirs.
L’anthracnose est une maladie fréquente et sévère dans les régions au climat chaud et humide. Elle est un problème important pour la tomate destinée à la transformation dans les conserveries. Elle affecte la saveur des tomates entières mises en conserve, du jus de tomate et des concentrés de tomate. La tomate de champ est plus sujette à l’anthracnose des fruits que la tomate de serre du fait que la récolte a lieu lorsque toutes les tomates sont mûres, ce qui prolonge leur séjour au champ.
Les plants affaiblis par d’autres maladies ou problèmes non parasitaires, qui défolient partiellement les plants prédisposent les fruits à l’anthracnose. Des pertes de rendement (environ 70 %) et de qualité des fruits sont enregistrées lorsque la maladie n’est pas contrôlée. En serre, les pertes de rendement sont liées principalement à la dégradation du système racinaire. Colletotrichum coccodes peut causer des dommages importants lorsqu’il est en complexe avec d’autres agents pathogènes du sol (Rhizoctonia solani, Phytophthora nicotiana et le nématode Meloidogyne spp.).
Le champignon hiverne sous la forme de microsclérotes et de conidies dans les résidus de culture (pelure des fruits infectés, racines des plants), sur les semences, des mauvaises herbes de la famille des solanacées et des plantes cultivées hôtes du champignon. Tard au printemps, lorsque la température est chaude et humide, les microsclérotes produisent du mycélium ou des acervules dans lesquelles sont formées des conidies.
Les conidies sont disséminées par les éclaboussures d’eau (pluie, eau d’irrigation), la machinerie, la main-d’œuvre et les particules de sol transportées par la machinerie agricole sur les feuilles ou les fruits. Les feuilles basales et les fruits peuvent également être infectés par les conidies présentes dans les débris végétaux au sol. Les feuilles basales infectées seront une source de spores importante pour les infections secondaires tout au long de la saison. Les infections se produisent lorsque la température varie entre 10 et 30 °C (optimum entre 20 et 24 °C) en présence d’un film d’eau. Le champignon germe à la surface des tissus et forme des appressoria qui pénètrent directement à travers la cuticule ou par des blessures. Le développement de la maladie est favorisé par de longues périodes de mouillure des feuilles et des fruits. L’infection des fruits est corrélée avec la quantité et la durée des précipitations.
Les infections sur les racines se produisent essentiellement en serre quand l’inoculum est élevé et que les conditions environnementales sont favorables pour le développement de la maladie. Les conidies sont facilement disséminées par la solution nutritive recirculante dans les cultures hors-sol. Colletotrichum pénètre dans les racines par des appressoria qui se forment à leur contact. La colonisation racinaire augmente avec l’âge de la plante. Le champignon colonise le cortex à l’aide de mycélium. L’anthracnose sur les racines se manifeste surtout dans les monocultures de tomate. Les blessures par les excès de sels (salinité élevée) et les sols humides prédisposent les plants aux attaques par C. coccodes. Sur les racines, la maladie est souvent appelée pourriture racinaire ("Black dot root rot").
Feuille et tige : présence de petites taches rondes, brunes avec un halo jaune, discrètes, mais qui sont la source de l’inoculum qui infectera les fruits mûrs. Les infections demeurent latentes comme pour les fruits verts.
Fruit vert : l’infection sur les fruits immatures demeure en état de latence jusqu’à la maturation ou s’ils subissent des températures basses. Les symptômes se développent rapidement après la période de latence.
Fruit mûr : présence de petites taches rondes, légèrement déprimées. Les taches s’agrandissent, pouvant atteindre 1 à 2 cm de diamètre, deviennent plus profondes et avec des anneaux concentriques. Le centre des taches est beige et à maturité, il montre de nombreux microsclérotes noirs incrustés dans l’épiderme. La chair sous ces taches est jaunâtre et d’une texture granuleuse. Par temps humide, le centre des taches devient plus foncé à cause du développement des soies (setae) sur les fructifications de l’agent pathogène. Les lésions déprimées se rompent fréquemment, exsudent des conidies dans une masse gélatineuse rose saumon (acervules) et permettent aux organismes secondaires de les envahir, ce qui peut causer de la pourriture molle. Les fruits qui sont en contact avec le sol sont souvent les plus gravement affectés, car les spores du champignon sont présentes sur les résidus de plantes.
Racine : présence de lésions (taches) brunes bien délimitées sur les racines. Quand les racines amorcent leur sénescence, des microsclérotes apparaissent en surface. Le cortex des grosses racines devient fortement altéré, pourri, fragile et s’enlève facilement. Les racines secondaires dépérissent et se décomposent, facilitant l’arrachage des plants affectés. Les symptômes deviennent évidents sur le plant quand les fruits commencent à mûrir.
Sur les racines, l’anthracnose peut être confondue avec la racine liégeuse (Pyrenochaeta lycopersici – absence d’acervules).
Pour lutter contre l’anthracnose au champ, il faut utiliser des semences certifiées saines traitées avec des fongicides, favoriser la rotation des cultures (3 à 4 ans) avec des plantes non hôtes et contrôler les mauvaises herbes. Tous les cultivars disponibles sont sensibles à l’anthracnose des fruits, mais les cultivars avec une maturité lente des fruits devraient être favorisés dans les régions sensibles à cette maladie. Des fongicides foliaires sont disponibles pour la tomate de champ, ainsi que des modèles prévisionnels. Les traitements fongiques doivent couvrir toute la période de la formation des fruits jusqu’à la récolte. Lors de la récolte, trier les tomates au champ lorsque c’est possible. Un labour profond après la récolte permet d’enfouir les résidus de culture et favoriser leur décomposition.
En serre, il faut éviter de cultiver la tomate dans des sols ayant un antécédent de la maladie et de pasteuriser les sols lorsque requis. Les systèmes de recirculation (eau, fertilisation) favorisent le maintien et la dispersion de l’agent pathogène, un suivi rigoureux est requis. Il n’existe aucun moyen efficace d’éliminer l’agent pathogène sur les racines une fois le diagnostic confirmé. Éliminer et détruire toutes les parties des plants malades afin de réduire l’inoculum pour les cultures ultérieures.
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